En France, le secteur du bâtiment représente 43 % des consommations énergétiques annuelles et 23 % des émissions de gaz à effet de serre, selon les chiffres du ministère de la transition écologique. Quelles solutions concrètes mettre en œuvre pour répondre à ces enjeux ? C’était la question posée par la fondation V-A-C à Venise, dans le cadre de la Biennale d’Architecture.
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Avec l’exposition “Non-Extractive Architecture”, la fondation V-A-C a voulu proposer un catalogue le plus large possible des solutions offertes aux architectes et acteurs du BTP pour imaginer des constructions plus durables, de l’impression 3D aux biomatériaux en passant par la séquestration carbone ou le réemploi des matériaux.
Le bois, star de l’habitat durable, en attendant mieux
Avec un bilan carbone bien plus avantageux que le ciment et l’acier, le bois connaît un fort engouement à travers le monde, ce qui n’est pas sans causer des tensions sur les chaînes d’approvisionnement. Les innovations dans le domaine sont nombreuses. Le studio LinaHaus a par exemple développé un système de construction reposant à 100% sur le bois, sans recours à des isolants additionnels. Pour les sols, le studio londonien Foresso propose un “terrazzo” conçu à partir de chutes de matériaux issus de l’industrie du bois.
Avec l’entreprise allemande Karuun, le rotin trouve des usages inattendus : après traitement, il peut remplacer le plastique dans l’architecture d’intérieur.
Pour autant, le bois n’est pas un matériau totalement durable : sa production et son transport sont source d’émissions de gaz à effets de serre et son traitement nécessite le recours à des produits chimiques. À travers le monde, des expérimentations sont menées sur de nouveaux types de matériaux, comme les algues (étudiées notamment à Arles, à l’Algae Platform hébergée par la fondation Luma), les sédiments (comme les tuiles imaginées par les Néerlandais de Waterweg), les biopolymères (utilisés par exemple dans le projet Aguahoja) ou les déchets (industriels, agricoles ou domestiques).
Les chercheurs s’intéressent notamment à la “biominéralisation”, le processus physiologique qui permet aux organismes vivants d’élaborer une structure minérale. Notamment, à l’Université du Colorado, des bactéries sont utilisées pour produire des matériaux de construction. L’avantage ? Ces organismes absorbent et transforment le CO2 pour produire du calcaire, qui peut ensuite être utilisé dans la construction.
Vers des matériaux qui absorbent et réutilisent le CO2
Dans le même temps, les bétons et ciments évoluent eux aussi, avec un objectif : émettre moins de CO2 lors de leur fabrication, voire en capturer. C’est le cas par exemple avec Solidia, qui propose un procédé de production de béton 30% à 40% plus économe en CO2 que les méthodes traditionnelles, et qui, en plus, utilise du CO2 à la place de l’eau pour le faire durcir.À travers la “carbonation”, un procédé utilisé notamment par Orbix en Belgique ou Blue Planet aux Etats-Unis, les briques et tuiles peuvent également servir à recycler du CO2 émis par d’autres industries. Au Canada, Carbicrete promet également des bétons “négatifs en carbone” : son procédé permet de remplacer le liant (traditionnellement, le ciment) par des scories issues des déchets des aciéries. Du CO2 est par ailleurs injecté dans le béton frais, “pour lui donner la résistance voulue, tout en emprisonnant de façon permanente ce gaz dans les produits obtenus.” Son compatriote CarbonCure est lui aussi positionné sur le même sujet.
Enfin, le cycle de vie des matériaux est aussi de plus en plus pris en considération. Finite est par exemple un matériau conçu à partir de sable du désert, alors que seul le sable de mer est habituellement utilisé dans la construction. Il a été pensé pour se décomposer naturellement au fil du temps : il est particulièrement approprié pour les constructions éphémères. Les briques Blocco Ambiente, quant à elles, sont conçues à partir de bois de chanvre et absorbent le CO2 au fil du temps.
En bout de course, des plateformes comme Opalis en Belgique, Metalscrapp en Italie ou WasteNot aux Etats-Unis répertorient les matériaux de seconde main disponibles localement et encouragent leur réemploi. Un premier pas vers une économie circulaire de la construction.